Avec un prix au mètre carré en baisse de 5 % à 15 % selon les régions depuis dix-huit mois et des conditions de financement très favorables, il peut être tentant de se constituer un patrimoine dans la pierre.
Mais, plutôt que d’acheter seul et de laisser vos enfants payer, plus tard, des droits de succession élevés, mieux vaut les associer à votre acquisition. Vous avez deux possibilités pour cela : l’indivision ou la société civile immobilière (SCI). « Cette dernière donne une liberté d’organisation exceptionnelle, car les statuts prévus au départ permettent de faire du sur-mesure pour la constitution d’un patrimoine familial ou l’anticipation de sa transmission dans les meilleures conditions », affirme Arlette Darmon, présidente du groupe Monassier.
Les statuts de votre SCI doivent correspondre à votre objectif (création d’un patrimoine, protection du conjoint…). Pour vous en assurer, consultez un professionnel – avocat ou notaire – qui les rédigera pour vous. Coût de l’opération : entre 1 500 et 2 500 euros, voire le double si votre situation est complexe (famille recomposée, par exemple) ou le montage très élaboré. Attention, une SCI vous oblige, chaque année, à convoquer une assemblée générale et à tenir à jour la comptabilité. Il est donc inutile, car coûteux, d’en créer une pour l’achat d’un petit studio mis en location. De même, sachez qu’avec une SCI, la location d’un bien meublé est interdite.
Face à ces contraintes, la SCI a des atouts à faire valoir. Tout d’abord, en vous nommant gérant, vous garderez la main sur votre patrimoine immobilier, même si vos enfants en sont les associés. Vous pouvez vous donner tous les pouvoirs de gestion (location, cession du bien…) et même prévoir de rester décisionnaire à vie, en indiquant dans les statuts que le gérant doit être révoqué à l’unanimité. Ce n’est pas possible dans une indivision, car les décisions sont toujours prises à la majorité simple, ou des deux tiers en cas d’importants travaux ou de vente. L’autre intérêt d’une SCI est qu’un associé ne peut pas forcer les autres à vendre le bien immobilier.
Droits minorés
C’est le contraire dans une indivision, où, en cas de mésentente, un indivisaire peut provoquer le partage en lançant une action en justice.
Côté transmission, la SCI offre aussi des avantages. Lorsque vous détenez un bien en direct, vous ne pouvez pas le transmettre sous forme de donation-partage à plusieurs de vos enfants, puisque cette donation doit porter sur des biens distincts. Or c’est tout à fait possible si ce bien est détenu par le biais de la SCI, puisque vous donnez des parts distinctes de cette société.
Il est aussi possible de minorer les droits de donation à condition d’acheter le bien à crédit, et de donner les parts juste après l’acquisition. « Les droits sont calculés sur la base de la valeur nette de la SCI, c’est-à-dire la valeur du patrimoine moins les dettes », précise Philippe Pescayre, avocat associé au Cabinet Alérion. Si votre crédit est de la même valeur que le bien immobilier acheté, vous transmettrez des parts d’une valeur nulle, sans être taxé.
Les SCI constituées en famille sont en général soumises à l’impôt sur le revenu. Les associés sont alors imposés comme s’ils détenaient le bien en direct. Dans ce cas, la SCI déduit les charges (intérêts d’emprunt, travaux, assurances…) des loyers qu’elle encaisse. Les revenus nets sont ensuite intégrés aux revenus des associés, et imposés chaque année selon leur tranche marginale d’imposition (avec en plus les prélèvements sociaux de 15,5 %).
Une SCI peut aussi être soumise, sur option irrévocable des associés, à l’impôt sur les sociétés. Dans ce cas, elle paie un impôt sur le bénéfice (15 % s’il est inférieur à 38 120 euros par an et 33,33 % au-delà). Chaque année, les associés décident de se distribuer sous forme de dividendes tout ou partie des bénéfices nets, ou de les laisser en réserve dans la société. Mais attention, ce système qui semble plus favorable ne l’est plus du tout au moment de la revente du patrimoine immobilier. Car dans ce cas, la SCI ne bénéficie pas de l’abattement pour durée de détention. Pire, la plus-value taxable est majorée, car elle réintègre l’amortissement du bien, déduit chaque année des loyers encaissés par la société. Au final, l’impôt sur les plus-values sera donc largement plus élevé.
Source : www.lemonde.fr